La grande diversité des livres proposés par les éditeurs entre les livres brochés, les livres de poche, les livres reliés, les éditions de luxe ou encore les livres avec des jaquettes ou des rabats indique déjà implicitement l’importance de l’objet livre, en plus de son contenu. Un beau livre désigne une catégorie bien particulière dans le jargon professionnel des éditeurs et des libraires. Faisons le point.
Qu’appelle-t-on un beau livre ?
Le statut du beau livre diffère de celui de l’œuvre d’art ou du chef-d’œuvre. Ces derniers se rapprochant du sublime alors que le beau livre est plutôt considéré comme un objet à la réalisation esthétique travaillée et inédite. Il se distingue alors du livre de poche, du livre relié ou encore du livre avec jaquette de par la considération que l’on donne à l’objet.
En effet, la quatrième de couverture attire rarement le lecteur immédiatement. Il commence tout d’abord par admirer la qualité de l’ouvrage au toucher, la beauté des illustrations ou des photographies, etc. C’est un livre généralement de grand format, avec des illustrations de grandes tailles et imprimé sur du papier de qualité. Il se rapproche de l’objet d’art qu’on a plaisir à exposer.
L’œil est attiré par la beauté du livre au-delà de l’attirance naturelle pour des livres plus « classiques » que ressentent déjà bon nombre de consommateurs en parcourant les rayonnages des librairies, des bibliothèques et des bouquinistes.
L’origine du livre en tant que symbole
Le livre est incontestablement un symbole de culture. Il représente aussi une forme de pouvoir et de privilèges. Généralement exhibés dans une bibliothèque, les livres sont aujourd’hui neufs ou d’occasion. Ils offrent un sujet de discussion entre les amoureux des livres et permettent des prêts entre les lecteurs.
À l’origine, toutefois, la détention de livres reflétait seulement les privilèges des érudits et des religieux. Ces derniers possédaient des ouvrages uniques, très chers, richement décorés d’enluminures par les meilleurs artistes de l’époque.
Le livre était alors un objet d’art à part entière : collectionné, recherché et acheté à prix d’or.
Sa mise en scène sur des étagères et l’esprit de collection a mené à donner de la valeur aux livres. La notion de beau livre vient de là.
Sa démocratisation
La révolution de l’imprimerie va démocratiser la fabrication des livres. En réduisant les coûts de création et en démultipliant le nombre d’exemplaires, l’aspect unique de l’ouvrage disparaît. Il n’en demeure pas moins que la qualité d’impression de certains livres permet de les ranger dans la catégorie des « œuvres d’art ». Cet aspect sera renforcé par le biais d’éditions limitées et numérotées ou par la création d’une série ou collection avec des couvertures ou des tranches facilement identifiables.
Dans une étude de 2019 publiée par la société Statista, 43 % des personnes sondées indiquent avoir lu des livres d’art ou beaux livres au cours des 12 derniers mois :
La notion de « beau » appliquée au livre
Cette notion de beau nous amène aussi à la subjectivité propre à chacun. La question du beau est plurielle, même s’il y a des critères pour classer un livre dans la catégorie « livre beau ».
Dans le domaine de l’art, certains trouveront cette peinture ou sculpture belle et d’autres seront très critiques envers la même œuvre. La perception du beau renvoie au sentiment de joie, de plaisir, d’apaisement. En lisant, en regardant un beau livre, vous pensez, rêvez, imaginez, revivez certains souvenirs.
Le beau livre peut tout autant reprendre des contes que vous lisiez enfant, comme Alice aux Pays des Merveilles de Lewis Caroll, par exemple. Le récit de l’auteur sera laissé intact dans son intégralité. Le travail de la maison d’édition sera porté sur la mise en page, les illustrations et l’apparence du livre.
Au-delà de la beauté intrinsèque de l’objet livre, l’ouvrage concourt à une expérience d’enrichissement visuel, plastique et physique pour le lecteur. Le livre crée une atmosphère d’une grande beauté. On le manie avec soin pour ne pas l’abîmer. L’aura dégagée par l’ouvrage change notre perception de l’objet par rapport à un livre « classique ».
Le retour en force du beau livre
Au même titre que la possession et la mise en scène de tableaux ou de sculpture, l’exhibition de livres atteste d’un goût artistique, mais aussi assoit financièrement sont propriétaire.
Ce côté « mise en scène » donna naissance à de multiples collections, toutes caractérisées par une unité de présentation de couverture les rendant facilement reconnaissables. C’est Louis Hachette qui en inventa le principe en 1856. Plus on en possédait et plus on affirmait sa position sociale.
Pour honorer ce statut, l’édition se devait d’être particulièrement soignée en utilisant des grammages forts, des illustrations de grands formats et en s’assurant d’une grande qualité d’impression.
Le beau livre est un parfait cadeau pour Noël, pour un anniversaire ou pour toute autre fête. Comme le livre d’art, il s’offre davantage qu’il ne s’achète pour soi. L’acheteur a envie de faire plaisir à son proche avec une histoire qu’il aimera et avec un objet qui l’émerveillera.
Le Syndicat National de l’édition (SNE) utilise même la notion d’objet de collection comme axe de communication autour du beau livre. Ce qui n’est pas étonnant puisque les lecteurs et collectionneurs des beaux livres d’aujourd’hui ont parfois l’histoire de l’auteur dans plusieurs exemplaires et se plaisent à collectionner différents formats d’édition enrichis ou améliorés. En effet, les illustrations ajoutées donnent de la valeur à l’ouvrage et à l’histoire.